Hormis leur célébrité, savez-vous quel est le point commun entre Maya Angelou, Kate Winslet, Charlotte Gainsbourg, Emma Watson, Antoine de Caunes et Albert Einstein ? Si l’on en croit Kevin Chassangre et Stacey Callahan, auteurs du livre Cessez de vous déprécier ! Se libérer du syndrome de l’imposteur, ils auraient tous ressenti à un moment donné un sentiment d’imposture. Pas toujours reconnu, le syndrome de l’imposteur est pourtant assez répandu. 70% de la population tendrait à douter de sa légitimité un jour ou l’autre, ne serait-ce qu’une seule fois. Tout comme moi, vous avez souvent peur de ne pas être à la hauteur malgré vos précédentes réussites ? Vous avez parfois l’impression de tromper votre entourage ? Que celui-ci surestime vos capacités ? Vous ne vous sentez pas toujours dignes de recevoir leur amour ou leurs compliments ? Vous attribuez volontiers vos succès à la chance, à un heureux hasard ou à vos relations, plutôt qu’à vos compétences ? Poursuivez votre lecture, cet article est fait pour vous…
C’est quoi le syndrome de l’imposteur ?
Définition du syndrome de l’imposteur
Il a été identifié en 1978 par Pauline Rose Clance et Suzanne Imes. Comme l’explique Kevin Chassangre, “le syndrome de l’imposteur se caractérise par un bon niveau de réussite et des signes extérieurs et objectifs de succès qui ne sont pourtant pas intégrés par l’individu.” En d’autres termes, il y a un gros décalage entre la façon dont l’individu se perçoit et celle dont il est vraiment perçu. Il fait généralement bonne impression (et peut même être envié ou pris pour modèle), mais il tend à l’autodépréciation. Le succès, la reconnaissance ou les compliments n’y changent rien. Au contraire, ces derniers créent un important malaise. Une personne souffrant du syndrome de l’imposteur rejette l’opinion positive que les autres manifestent à son égard. Ce syndrome touche les hommes et les femmes dans divers domaines (travail, famille, couple…).
S’il est courant chez les scientifiques, les artistes, les autodidactes, les « fils et filles de », les personnes non diplômées ou exerçant une profession non reconnue, il concerne toutes les catégories socioprofessionnelles. A noter que les surdoués ou personnes à haut potentiel et les introvertis y sont souvent sujets. Ce n’est pas une pathologie, mais il peut causer des souffrances psychologiques, des angoisses, de l’anxiété voire un stress aigu dus à la peur d’être démasqués. Il peut aussi engendrer un burnout ou bloquer l’expression de notre plein potentiel. En effet, on observe 2 comportements chez les gens présentant ce syndrome : la procrastination ou le travail frénétique. Ce dernier, couplé au fort besoin de reconnaissance, crée le phénomène de superwomen ou supermen qui multiplient les tâches et s’épuisent pour prouver inconsciemment leur valeur aux autres.
Souffrez-vous du complexe d’imposture ?
Le syndrome de l’imposteur est évidemment lié à un profond manque de confiance en soi, d’estime de soi et d’acceptation de soi. Les 3 symptômes fondamentaux de ce syndrome sont l’incapacité à s’attribuer sa réussite, l’impression de tromper son entourage et la peur d’être démasqués par les autres.
Voici la liste récapitulative de critères descriptifs établie par Holmes, Kertay, Adamson, Holland et Clance :
1. L’individu se décrit comme un imposteur (tricherie, plagiat, fausse intelligence, fraude)
2. Il a des difficultés à accepter les félicitations et la reconnaissance
3. Il lui est difficile de croire qu’il mérite les retours positifs
4. Il tend à être déçu de sa réalisation, pensant qu’il aurait pu mieux/ plus faire
5. Il craint que les autres puissent un jour découvrir son manque de connaissances ou de compétences
6. Il a peur de l’échec
7. Il a peur de ne pas pouvoir répéter, reproduire son succès
8. Il a le sentiment de ne pas être la même personne en public et en privé
9. Il tend à réussir, même s’il craint l’échec avant même d’essayer
10. Il craint de ne pas réaliser les attentes
11. Il se sent moins capable ou intelligent que les autres, malgré des signes évidents qui prouvent le contraire
12. Il tend à attribuer son succès à des causes externes
13. Il peut croire que des rituels comportementaux sont nécessaires pour assurer une réussite
14. Il peut préférer des postes à bas niveau/ non stimulants de peur d’échouer à un poste légitime de ses capacités
15. Il est incapable d’internaliser son succès/ persiste à se croire incompétent, malgré des signes de réussite
Si vous présentez au moins 5 de ces caractéristiques, vous manifestez probablement un syndrome de l’imposteur… Il existe aussi un test mis au point par Pauline Rose Clance, nommé Echelle de Clance. Elle a également mis en évidence 6 symptômes qui permettent d’identifier l’hétérogénéité de l’expression du syndrome de l’imposteur : le cycle de l’imposteur, la peur de l’échec, la peur du succès (ou la culpabilité vis-à-vis du succès), le besoin d’être remarquable, les attitudes de supermen ou superwomen et le dénigrement de ses propres compétences.
D’où vient le syndrome de l’imposteur ?
Vous vous demandez quelles sont les causes du syndrome de l’imposteur ? Eh bien, plusieurs facteurs peuvent expliquer son apparition comme l’environnement dans lequel vous avez grandi, votre contexte familial ou vos traits de personnalité. Ces derniers peuvent expliquer entre 36% et 43% de la variance du syndrome ! Les messages parentaux ont aussi un impact important (messages des parents ou d’autres figures jouant un rôle significatif dans l’enfance). Ce sont eux qui donnent naissance aux fausses croyances. Si l’on revient sur la théorie de l’attachement, il existe 3 styles d’attachement : l’attachement sécurisé (réponses aux besoins de l’enfant de manière cohérente et régulière), l’attachement anxieux (réponses irrégulières aux besoins) et l’attachement évitant (résultant de négligences). Vous vous en doutez, les 2 derniers favorisent également la manifestation du syndrome de l’imposteur.
Voici des situations propices au développement du syndrome de l’imposteur dans l’enfance : manque de soutien émotionnel, absence de soins, contrôle, surprotection, conflits, attentes inaccessibles (enfant parfait), qualités peu reconnues ou valorisées, compliments exagérés, comparaison sociale, pression parentale, trop grande valorisation de l’intelligence et/ ou de la performance, enfants parentalisés (rôles parents/ enfants inversés)… Bon, allez les parents, déculpabilisez ! Meuh non, tout n’est pas de votre faute… D’autres facteurs contextuels peuvent jouer à l’âge adulte : environnement de compétition/ de concurrence, manque de collaboration/ de coopération au travail, pressions de réussite, sentiment d’isolement/ manque de soutien, succès inattendus… Le syndrome de l’imposteur peut se manifester également lors de grandes transitions ou de l’acquisition de nouveaux rôles au cours de la vie.
Comment surmonter le syndrome de l’imposteur ?
Etape 1 : acceptez votre syndrome de l’imposteur
Comme le soulignent Kevin Chassangre et Stacey Callahan, la 1ère étape consiste à reconnaître et accepter le syndrome de l’imposteur. Nous l’avons vu, il implique 3 manifestations : l’impression de tromper son entourage, la mauvaise attribution et la peur d’être démasqués. Prenez une feuille de papier et répondez aux questions suivantes : qui avez-vous l’impression de tromper ? Quelles situations avez-vous tendance à expliquer par des causes indépendantes de vous (chance, hasard, coïncidences, relations, erreurs…) ? Qui peut vous démasquer ?
Etape 2 : osez parler du syndrome de l’imposteur
Trouvez des personnes proches et de confiance avec qui vous pourrez échanger ouvertement sur le sujet. N’hésitez pas à leur exprimer vos sentiments, vos doutes, vos craintes… Cela vous permettra de dédramatiser et de vous rendre compte que d’autres personnes partagent vos ressentis. Certains seront sûrement très surpris par votre confidence, surtout si vous avez un certain nombre de succès à votre actif ! Grâce à ce petit exercice vous allez pouvoir ôter le caractère secret du syndrome de l’imposteur ainsi que votre masque d’imposteur. Ahhhh, ça fait du bien ?
Etape 3 : remplacez vos vieux automatismes
Vous avez identifié les origines potentielles du syndrome de l’imposteur. Vous en avez parlé autour de vous et surtout, vous avez compris ce mécanisme ? Vous êtes maintenant aptes à remettre en cause toutes vos fausses croyances et à remplacer vos vieux automatismes par de nouvelles habitudes. Si, si, c’est possible, avec du temps et de la persévérance, vous y arriverez. Oui, même si ces vieux automatismes sont bien ancrés !
Pour aller plus loin
Cessez de vous déprécier ! Se libérer du Syndrome de l’Imposteur de Kevin Chassangre et Stacey Callahan
Pour conclure
J’ai voulu vous parler du syndrome de l’imposteur parce qu’il me gâche la vie depuis trop longtemps. Pourtant, j’en parle rarement. Alors, ça y est, je me jette à l’eau ! J’accepte de lever le masque et de vous faire quelques confidences. Saviez-vous, par exemple, que j’ai mis des mois à écrire l’ebook que je vous offre en échange de votre inscription à la newsletter ? Je ne vous raconte pas le stress au moment de la mise en ligne. On aurait dit que ma vie en dépendait. Je sais, c’est ridicule ! J’ai plein d’idées chaque jour pour mes différentes activités et je n’en ai pas mis la moitié en place. Perfectionniste à l’extrême, à trop vouloir bien faire, je ne fais rien. Je gaspille mon temps et mon énergie dans des détails. Peur de l’échec, besoin de contrôle, besoin de reconnaissance, besoin d’être remarquable, phénomène de la superwoman, anxiété, stress… Oui, tout ça je connais bien. Je veux tout faire, tout faire bien et faire bien du 1er coup. J’ai toujours eu l’impression qu’on me surestimait et ça me met une pression pas possible. J’ai tellement peur de décevoir… Je vois les qualités et les compétences des autres, mais pas les miennes. Je suis d’ailleurs super mal à l’aise quand on me complimente. Mais depuis quelques années, mes rêves sont devenus plus importants que mes doutes. Alors j’ai décidé d’arrêter l’autosabotage. Aujourd’hui, je me force à passer à l’action, même si ça me demande plus de temps que les autres. Je me félicite quand même de l’avoir fait. Je deviens plus indulgente avec moi-même. Et si vraiment ça me parait trop dur, maintenant, je me fais coacher. Et vous, c’est quoi vos petits secrets ?
Sources
La modestie pathologique pour une meilleure compréhension du syndrome de l’imposteur de Kevin Chassangre
Cessez de vous déprécier ! Se libérer du Syndrome de l’Imposteur de Kevin Chassangre et Stacey Callahan
Le syndrome de l’imposteur – Emission La Tête au carré du 13 janvier 2016 (France Inter)
Le site de Pauline Rose Clance
Crédit photos : Freepik
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5 Commentaires
Merci Julie pour mettre des mots sur quelque chose que je peux moi aussi ressentir parfois. Ça fait du bien de ne pas se sentir seule. Lire ces mots me permet de prendre conscience qu’il fait parfois lâcher prise et juste accepter certaines choses.
Continue avec tes articles toujours bienveillants et lucides !
Et je ne sais pas si je te l’ai deja dit : j’ai beaucoup aimé ton ebook que j’ai lu il y a déjà pas mal de temps.
Voila un article qui me parle! j’ai même l’impression qu’il parle de moi!
Je suis autodidacte , créatrice, et j’ai passé ma vie à penser que je n’étais pas légitime! Toujours minimiser ce que je fais, car comme je n’ai pas fait des années d’études, forcement, ce que je fais est accessible à tout le monde!
je déprécie du coup ce que je fais … Je passe également par des phases de travail très intense, ou je dois être la « meilleure », je dors peu, angoisses mêlées de joies intenses lorsque j’arrive à atteindre mon but, cerveau en ébullition, une idée à la seconde, pic de stress…. et puis … épuisement , burn out, suivi de procrastination mêlé à de fortes angoisses, du temps qui passe, l’isolement, de ne plus avoir ma place dans la société, et plus je vieilli plus c’est dur!
je pense qu’en plus notre société occidentale contribue énormément à ce mal être… comparaison, compétition, réussite pro = vivre aisément, être belle, ne pas vieillir, ou alors avoir la décence de le faire « bien »!!, être forte, ne pas se plaindre, ne pas demander de l’aide, être agréable, positive 😉 … toujours, tout le temps…
Il est vrai que j’ai grandi et vieilli à cotés de nombreux PN, alors forcement pour la confiance en soi… je repasserai!
Apres pour ma part, je pense que l’ego joue un rôle très important, il m’aide à ne pas sombrer, mais du coup, il met également la barre très haut en terme de réussite … le lâcher-prise est super important, sauf que comme on dit « c’est plus facile à dire qu’à faire!!! » 😉
Merci, Julie ! Encore une de tes nombreuses qualités … : offrir aux autres et partager avec eux tes expériences, tes lectures, tes mots. Je me retrouve beaucoup dans ce qui est expliqué dans cet article. Et aussi énormément dans le commentaire biographique de Bénédicte. Bah … tu vois … Il est 02:20, et je ne dors pas !!! J’angoisse, je stresse, je ressasse la quantité de « choses à faire » que j’ai listées et dont je me sens incapable ; j’ai peur, j’ai honte, je suis épuisée, je craque, je stagne, je déprime. Et puis il y a les jours où j’ai le sentiment que je peux tout faire, tout entreprendre et tout réussir ; mais ces jours-là sont trop rares pour me faire du bien.
Merci les filles pour vos gentils petits mots ! Je me retrouve dans vos commentaires et je crois que c’est important d’oser en parler. Ça fait du bien de se rendre compte que d’autres personnes vivent la même chose plutôt que de rester dans son coin et de souffrir en silence… Moi aussi, j’alterne les hauts et les bas, les moments où je me sens capable de faire plein de choses extraordinaires et les autres où je me sens écrasée par tout ce que j’ai à faire et ne sais plus par quel bout commencer… Moi aussi, parfois je me sens nulle, moins douée que les autres et j’ai l’impression que je ne vais pas y arriver. D’où l’importance de s’entourer de gens bienveillants aussi, qui connaissent nos compétences et nos qualités et savent nous les rappeler en période de doute. Moi, je vous connais toutes les 3 et je crois en vous !!!
Bonjour Julie,
Chouette article sur le syndrôme de l’imposteur qui s’est invité au moins une fois dans la vie de tout un chacun. Notre façon de lui donner de l’importance ou de l’ignorer fait le reste car, au final, comme pour beaucoup de choses, c’est nous qui « choisissons » ce qui nous affecte ou pas, ce que nous allons trimballer avec nous ou pas…
Ce syndrôme est intimement lié avec le système scolaire, notre éducation et les 5 drivers de l’analyse transactionnelle (« sois parfait » « fais plaisir » « sois fort » »fais des efforts » « dépêche toi »)… pas toujours facile de s’en défaire 😉
À bientôt !
Isabelle